Quatre mois se sont écoulés depuis
notre retour. Le bilan n'est peut être plus objectif. En effet, on ne
retient en général que les meilleures choses pour en oublier les plus
pénibles.
(+++++)On ne peut rien reprocher au comité
organisateur qui a été largement à la hauteur de l'évènement.
Organiser une régate avec 80 voiliers et presque 400 personnes ne peut pas être simple. Le
prix de l'inscription paraît dérisoire à côté de la
prestation, du service rendu. Pendant les 15 jours de la régate, aucune
place de port n'a été à notre charge. Les repas du soir ont été
offerts par les sponsors en général, allant de la sardinade sur le port
au repas de gala dans les grands hôtels. Des bus étaient à notre
disposition pour nous rendre à nos soirées. L'excursion à Sélinonte en
Sicile était entièrement gratuite. L'encadrement était satisfaisant et
rassurant, le guidage à l'entrée des ports parfaits avec l'assurance
d'avoir une place.
(++++)Rassurant aussi car compte
tenu du nombre de voiliers participants à la régate on peut se faire
conseiller, dépanner et même remorquer à tout instant. Il n'empêche
qu'un bon niveau en voile et un très bon entraînement est à mon avis
souhaitable car par expérience et à plusieurs reprises les situations
sont devenues critiques. Traverser les bouches de Bonifacio à la voile la
nuit, dans le trafic dense, quand le vent force et que les feux se
confondent n'a rien à voir avec une petite virée un jour de beau temps
à la crique d'à côté.
(++++)Pour les navigateurs sans voilier, il y
a toujours moyen de trouver un embarquement au départ de Toulon mais
surtout pour le retour afin de remplacer les équipiers repartis en avion.
Si vous n'avez que quinze jours à consacrer à la régate, l'organisation
peut prévoir votre retour en avion dans un tarif réduit.
(++++)Pour les futurs concurrents, sachez
avant de partir que vous n'aurez que peu de temps à chaque escale pour
visiter et récupérer. Par contre la formule sera une excellente approche
à la navigation hauturière que l'on peut réaliser en famille de
manière détendue et sympathique. Ceci explique probablement que beaucoup
sont sur la ligne de départ plusieurs années de suite. La gazette
de la Route du Jasmin est éditée à chaque escale, on peut y
découvrir des conseils mais surtout les anecdotes de la régate.
(+++)La souplesse de l'organisation nous
a permis de nous rendre aux îles Egades grâce à un départ 6 h 00 avant
tous, pour raccorder la régate en chemin.
(+-)Le rythme de la régate nous a paru
soutenu, d'autant plus que nous voulions profiter de toutes les visites
proposées ainsi que les déplacements au Cap Comino et aux îles Egades
réalisés sur notre temps de repos. Nous avons en réalité été pressé
par le temps pendant les 30 jours de notre tour de Méditerranée, une
distance à parcourir que l'on savait dès le départ trop importante pour
le temps imparti.
(--)Les vacations radio deux fois par jour
n'étaient par contre pas toujours réalisable. Celles-ci
s'effectuant avec le bateau comité en général très en avance sur le
gros de la flotte, donc hors de portée radio. Lorsque celles-ci étaient
possibles, chacun voulant parler avant l'autre provoquait un message
inaudible.
(---)La prévision météo a été par contre très
moyenne, tout le monde sait que la prédiction du temps à venir n'est pas
une science exacte mais souvent elle allait à l'encontre de la réalité.
A deux reprises les épreuves ont été reportées à cause d'un vent de
25 à 35 kt qui aurait permis à notre voilier une bonne vitesse de
croisière au portant, pour finalement partir le lendemain avec 10 à 20
kt au près dans la houle de la veille. Il est bien évident que les
décisions ont été prises par le comité organisateur au nom de la
sécurité et pour s'adapter à tous.
(-----)Ce qui a pu nous faire rire au
premier abord puis agacer franchement par la suite, c'est la moralité
douteuse de certains concurrents qui à mon avis, sous prétexte qu'ils
ont payé veulent profiter de tout sans même respecter les autres. Ainsi
on a pu observer des participants laver à outrance leur voilier dans des
contrées où l'eau est des plus rare, brancher le chauffe eau du voilier
ou les équipements gros consommateurs alors que tout le monde sait qu'il
y a 190 volts à la prise au lieu des 220 réglementaires : dommage pour
celui qui voulait simplement recharger les batteries ou son portable. Nous
avons vu aussi des concurrents monter à l'assaut du robinet, y fixer un
tuyau en faisant comprendre que si l'on voulait de l'eau il faudrait
partager avec d'autres. Mais le summum de l'incorrection à pu s'observer
lors des repas en self services où certains n'ont pas hésité à prendre
la nourriture à la poignée en prenant bien soin de piétiner leurs
voisins, pour finalement en laisser les 3/4 dans l'assiette ou alors
mettre en Tupperweare pour les jours suivants. Ces remarques peuvent
paraître du détail mais si par bonheur (pour nous et le comité
organisateur je pense) vous vous sentez
quelque peu concernés lorsque vous lisez ce paragraphe, sachez qu'un
effort même petit pour rester courtois, poli et respectueux des autres
permettra de rendre plus convivial encore la Route du Jasmin. De plus il
est regrettable qu'une minorité d'individus fasse croire à tous que la
voile est un sport d'égoïste.
Plus personnellement, je garderais un
souvenir inoubliable de cette aventure rendue parfois pénible par le mal
de mer où il vous vient des envies de passer par dessus bord pour que ça
s'arrête, l'angoisse parfois de savoir que l'on est à une journée de
mer de la terre la plus proche, que la mer est immense et puissante...,
compensé rapidement par la beauté d'une nuit étoilée, la voie
lactée comme il est impossible de la voir maintenant à terre, le temps
d'observer le ciel, les étoiles filantes à épuiser vos vœux, le temps
d'observer la mer, un dauphin qui qui vient vous saluer, voir de ses yeux
des baleines, observer le vol furtif des poissons volants, découvrir un
port, une île, une côte que l'on imaginait en regardant la carte...
Le 15 août, dans le feu de l'action, je
m'étais dit que c'était trop difficile, trop long et j'avais juré de ne
plus recommencer ça. Le 15 novembre, ces sensations me manquent
déjà.
|